"Night Owls"

La nuit. Aussi loin que je m’en souvienne, cela a toujours été mon repaire favoris. L’élément dans lequel je m’épanouis pleinement, et peux vraiment être moi-même. A chaque fois que Nyx habille de son voile étoilé le ciel, c’est un émerveillement sans cesse renouvelé. Enfin, c’était. Les récents événements ont en effet fait, de ces petits moments d’obscurité que j’ai tant chéri, de véritables hantises. Une effroyable régression, un vertigineux bon dans le passé. Voilà ce à quoi ressemble ma vie. Vingt ans. La désagréable sensation d’être tiré et ramené vingt ans en arrière, est plus oppressante et forte que jamais. Le revoilà. Cet adolescent livide, amorphe et hagard. Cette pathétique âme en détresse recroquevillée en boule sur son lit, et tremblante comme une feuille. Je m’étais pourtant juré que plus jamais, il n’entraverait ma vie et m’empêcherait d’aller de l’avant. Je le croyais mort. Disparu. Anéanti. Belle illusion … . Depuis tout ce temps, il a toujours été là. Tapit dans les méandres de mon subconscient. Attendant patiemment son heure, afin de se rappeler à mon bon souvenir. Tout ces trésors d’effort que j’ai déployés à le refouler, à l’occulter et l’ignorer … . Tout ça, c’était du vent. Un coup d’épée dans l’eau. Don Quichotte se battant contre les moulins à vent. Bref, appelez ça comme vous voulez. Comment ai-je pu être assez naïf pour croire que je serais en mesure d’oublier ? Au final, on n’oublie jamais.

On apprend simplement à vivre avec. Qu’importe les airs que vous vous donnez, les masques que vous pouvez porter et les pseudos nouveaux départs que vous pouvez prendre. C’est là. En vous. Une souillure que rien n’estompe. Une marque au fer rouge indélébile. Quand bien même les cauchemars et les cris au beau milieu de la nuit disparaissent, rien n’efface … . Quel sombre idiot fais-je ! Espérer qu’un hypermnésique puisse oublier. Une veine chimère, un vœu pieux, un simulacre. Autant exiger d’un cleptomane qu’il arrête de voler. A jamais cette capacité, qui aurait pu être une bénédiction, sera mon supplice. Mon bourreau. Mon tortionnaire. Cruelle ironie du sort. Depuis, l’adrénaline est devenue mon opium. Une sorte d’éther m’enivrant et me transportant dans un ailleurs calme, apaisé, quiet. Plus. Il m’en faut toujours plus. Plus de sensations fortes, plus de jeux dangereux. Que puis-je faire, et espérer d’autre ? Un psychologue dirait très certainement, que je cherche inconsciemment à revivre ce qu’il s’est passé vingt ans auparavant à travers toutes ces petites morts. Le revivre inlassablement et inexorablement, afin de comprendre pourquoi. Pourquoi moi ? Qu’ai-je fait, ou pas fait, pour mériter ça ? Oui, je pense qu’au fond de moi, je cherche à trouver et comprendre la raison qui a motivé une telle chose. C’est ce qui m’aide sûrement à ne pas perdre pied, et à ne pas partir à la dérive.

Je refuse de croire, que c’était là un acte gratuit. Une simple pulsion bestiale et animale. Il y a forcément une raison. Je veux qu’il y ait une raison. J’ai besoin qu’il y ait une raison. Tout ceci est si loin maintenant. Si loin et pourtant si proche. Passer une nouvelle nuit aux prises avec ces macabres réminiscences, c’est plus que je ne puis en supporter. Je vais finir par perdre la raison, à force de tourner en rond dans la chambre et dans le salon. Las de me couper les cheveux en quatre, et de m’étioler dans le but de résoudre cette équation insoluble, je m’étais finalement décidé à sortir ce soir là. Attention, il n’est nullement question de profiter, de se détendre et de passer un bon moment autour d’un verre. Oh, que non ! Ce soir, j’entends bien faire quelques heures supplémentaires. Mettre mon cerveau en veille, mon corps en suspension et me shooter à grands renforts d’adrénaline. Pour cela, il n’y a pas trente-six solutions. Du moins, pour moi. Ce grand frisson, je ne le ressens qu’en m’adonnant au plus vieux métier du monde. Toutefois, ne vous y méprenez pas. Je ne suis pas une Messaline ou une Hétaïre, enchaînant les passes comme on enfile les perles. Non, je suis d’un tout autre standing. Un escort de luxe. Quelqu’un d’éduqué, spirituel et sachant faire la conversation. Un être écoutant avec complaisance les névroses, les exploits, les tourments et les triomphes des grands pontes de cette ville.

Une oreille attentive recueillant leur confiances, qui se transforme peu à peu en un corps désincarné qu’ils consomment et possèdent le temps d’une nuit, avant de le jeter comme l’on jette un kleenex usagé. Je vais peut-être vous surprendre, mais je ne trouve rien d’humiliant, de déshonorant et de rabaissant dans ce que je fais avec tout ces hommes. Au contraire, je suis très flatté de savoir que des hommes sont prêts à dépenser des sommes faramineuses, afin de passer un éphémère instant avec moi. J’existe. Je compte. J’ai une valeur. Oui, cela m’aide à m’en convaincre. Depuis qu’il m’a … . C’est devenu une quête permanente. Une sorte de procédé de réassurance narcissique. Évidemment, je vous mentirais si je vous disais qu’il n’y a aucun homme tordu ou mal attentionné, qui se prend dans mes filets. J’en ai vu des désaxés, croyez-moi. Des mecs qui veulent être talqués. D’autres qui veulent être fessés. Et je ne parle même pas de ceux qui font le chien … Ahem ! Hélas, dans ce « métier » plus que n’importe où, les hommes brutaux et ayant la gifle facile sont légion. Parfois, cela arrive que je tire le mauvais numéro, si je puis m’exprimer ainsi. Toutefois, j’ai retenu la leçon et ne suis pas prêt de tendre l’autre joue. Comme on dit, deux précautions valent mieux qu’une. C’est bien connu. J’ai toujours sur moi des petits cachous, au cas où la situation tournerait au vinaigre. Un sédatif dans le verre d’un de ces soudards et … hop, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, ce cher monsieur se retrouve hors-jeu.

Bien entendu, lorsque je m’adonne à ce genre de … petit business nocturne pas très recommandable, dirons nous, j’essaye autant que faire se peut, de la jouer discret et de ne pas être reconnu. Je me coiffe de manière différente, je redessine ma bouche afin qu’elle soit plus pulpeuse, je mets des lentilles de couleur vertes. Enfin vertes ... . C’est pas tout à fait ça. Mon iris étant noir, le résultat vire plus au maronnasse qu’au vert émeraude. Enfin passons, ce n’est qu’un détail. Ce soir, je suis sur un de mes terrains de chasse de prédilection : le Loverholic. Tsukiko, la propriétaire, est une connaissance de longue date. Elle a organisé une soirée sur le thème cabaret. Et histoire de faire le buzz et attirer encore plus de client, elle m’a invité à passer. Ici, c’est le repère des fils à papa plein de fric, et qui n’ont aucune notion ni réalité des choses. Autant dire une aubaine. Je pourrais leur facturer le triple voire le quadruple de ce que j’exige en temps normal, ils mettraient la main au porte-feuilles sans broncher. Après m’être montré, avoir embrassé Tsukiko afin de la remercier de m’avoir invité, je ne suis guère resté bien longtemps assis seul au bar. Le poisson sur lequel j’ai jeté mon dévolu, a très vite mordu à l’hameçon. D’abord le coup des cheveux, puis celui des yeux et enfin le coup de grâce avec un sourire ultra brite. Trop facile … . C’est loin d’être un Apollon ou un tombeur, mais bon ça va ça passe.

J’ai déjà vu bien plus pire. Dix ans de moins que moi, tout autant de centimètres qui nous séparent, des cheveux cramés à la décolo’ et un accent de la région d’Icheon à couper au couteau. Ce qu’il peut m’énerver avec son air de j’ai tout fait, tout vu, tout connu ! En plus, il ne tient pas l’alcool c’te con. Trois Bloody Mary, et le voilà ourdi saoul. Dieu merci, ce sale gosse compense son physique banal et sa personnalité détestable, par une excellente situation. Le fils d’un banquier d’affaire. C’est bon ça. C’est très bon même. Aller, prend sur toi, ce n’est qu’un mauvais moment à passer. Comme tout les minets de son âge, il doit être du genre quinze minutes douche comprise. Si c’est le prix à payer, pour se voir remettre une enveloppe craft pleine de billets, alors soit. Un bien petit prix finalement. Une fois mon butin amassé, je pourrais enfin m’offrir ce smoking Saint Laurent, qui me fait de l’œil depuis un bon moment. Aller Ki O, reste concentré sur la récompense. Et surtout, quoi qu’il arrive, tâche de paraître le moins blasé possible. Franchement, c’est tout sauf une mince affaire. Ce mec est encore plus soporifique, que les débats sur la chaîne parlementaire. C’est dire ! Voilà prêt d’une demie-heure, que je l’écoute déblatérer ses histoires d’actions, de stock options et de fusion absorption. Le tout en feignant d’être en pâmoison devant lui, bien entendu. C’est le b-a ba du métier.

Si vous ne donnez pas l’impression au « client », qu’il est l’homme le plus fascinant et le plus merveilleux qu’il vous ait été donné de voir : c’est foutu. Comme dirait ma mère : « Lorsque que tu arrives à faire croire à un homme qu’il est le plus beau, le plus riche et le plus intelligent : tu as tout gagné ! ». Je ne sais pas ce qui est le plus insupportable. Devoir écouter ses paroles assommantes, ou le fait qu’il me crache en permanence la fumée de sa clope au visage ? Le sens des paroles de la chanson Dieu est un fumeur de havane, prend soudainement tout son sens. Je vois tes volutes bleus, me faire parfois venir les larmes aux yeux. Ouais … je comprends maintenant. Qu’est-ce que … . Non mais, tu as vu la vierge à cheval toi !? Tu as cru que tu allais pouvoir m’embrasser sans pouvoir allonger les billets ? Aller, bouge ! Alors qu’il se penche vers moi pour tenter de m’embrasser, je me décale légèrement sur le côté. Résultat des courses : il tombe de son siège et s’étale comme un merde par terre. Non mais pincez-moi, je rêve : il pionce ! Tsss … . « Je vais te faire te jouir jusqu’à l’aube. », qu’il disait. Ouais bien sûr, cela a failli être ça, tiens ! Crétin, va ! Bon maintenant que Super Zéro est hors-jeu, qu’est-ce que j’ai d’autre à me mettre sous la dent ? Non, trop jeune. Trop vieux. Pas assez blindé. Ca … à moins qu’une analyse nous prouve le contraire, c’est une femme. Pfff, c’est Waterloo morne pleine !

C’est malin, je suis frustré maintenant. J’ai besoin d’une cigarette pour compenser. Je descends donc de mon siège, marche sans aucun respect sur le dos du mec par terre cuvant tout son putain de saoul comme si c’était un paillasson, et me dirige en direction du petit fumoir en sous-sol. Whaa, mais c’est Woodstock ici ! Des couples et … même des trios, s’embrassent et se câlinant dans les coins, les alcôves et sur les divans. Eh bah dit donc, je ne regrette pas d’être venu moi ! Je sors un paquet de cigarettes de la poche intérieure de mon blazer, et fait rouler la pierre de mon zippo sur la semelle de ma chaussure afin de m’allumer. Balayant les alentours, mon regard finit par s’arrêter sur un jeune homme adossé contre un mur. Taille moyenne. La vingtaine bien sonnée. BCBG. Non pas dans le sens bon chic bon genre, mais plutôt beau cul belle gueule. Hum, il n’a pas l’air de faire parti des pleins aux as venus pour s’encanailler. Non, cela doit sûrement être l’un des « employés » de Tsukiko. Une si belle friandise qui fait tapisserie … ? Etrange. Surpris, j’arque un sourcil et esquisse un sourire en coin carnassier. M’avançant juste à côté de lui afin de m’appuyer sur le mur, je lui demande sur un ton quelque peu sardonique et en expectorant un nuage de nicotine : « Ca mord ? ». Question purement rhétorique, et avec une pointe de sarcasme, puisque de toute évidence, cela ne semble pas se bousculer au portillon pour lui. A moins, qu’il n’essaye d’échapper à quelqu’un ou de tirer au flan ? En tout cas, il semble de loin être la seule et unique personne dans cette pièce, qui soit digne d’un minimum d’intérêt. Espérons que je ne me sois pas trompé … .

"Night Owls"

Une nouvelle soirée spéciale… Dong Soo en était surpris, depuis le succès de la dernière soirée spéciale, Tsukiko semblait ne plus s’en passer. L’host ne s’était cependant pas remis de la dernière soirée, cet alcool qui lui était monté à la tête, l’avait rendu presque malade de ce genre boisson. Monotone, c’est avec une humeur de paillasson que la sonnette rentrait dans le LoverHolic, prêt à affronter des gens désagréables ou agréables, cela dépendait. Il pouvait parfois tomber sur des pervers qui ne voulaient que ses fesses, mais ça restait qu’un détail. Dong Soo s’était habitué de ce genre de personne, bien qu’il soit naïf il n’allait pas faire la même erreur qu’à chaque fois, c’en était hors de question. Et puis, il n’assumait pas son homosexualité alors il préférait quand c’était une femme, ça restait sa zone de confort. Car, quand il est hors de sa zone de confort, ça peut vite devenir gênant. L’host entrait donc dans le bâtiment, avec son petit sourire niais de d’habitude même si au fond, il était plutôt dans une bad mood. Cette dernière soirée, ne s’était pas mal passée… C’était juste l’alcool qui faisait ça. Les autres en étaient habitués, Dong Soo ne tenait pas très bien l’alcool après tout.  Le truc surprenant dans tout ça, c’était qu’il n’était vraiment pas d’humeur à faire des blagues, lui qui en fait malgré les bad mood… Aujourd’hui c’en était hors de question ! Cette atmosphère bizarre et calme, prenait déjà la tête à Dong Soo, il regardait alors les clients. Tous se ressemblaient bizarrement, il marchait alors tranquillement, jusqu’à ce qu’un client ne l’interpelle. Soo, était son pseudonyme d’host, il était présenté ainsi sur l’instagram du LoverHolic d’ailleurs. Il s’amusait à lire les commentaires, ça satisfaisait son égo, forcément, beaucoup trop souvent. Alors ça ne l’habituait pas aux commentaires négatifs qu’il pouvait recevoir dans la gueule. Trop peu habitué que les commentaires salaces, étaient beaucoup trop fréquent.

Passons, un client l’avait interpellé, l'appelant par son pseudo d’Host. Dong Soo tournait alors son regard vers cette personne, qu’il n’avait jamais vue auparavant… Un nouveau venu,  peut-être, il avait l’air perdu en tous cas. S’avançant donc vers cet homme, le brun affichait alors son plus charmant sourire qu’il pouvait faire et lui demandait ce qu’il voulait, version poli. Après de longues minutes à faire des tentatives de dragues, le client passait enfin par sa demande. Un échange de numéro de téléphone, woh. C’était juste pour ça ? Avec autant de phrases de dragues, Dong Soo aurait espérer finir dans le lit de ce mec. Mais apparement, non, il était là pour une relation “sérieuse” ou… Pour un plan ? Qui sait ? Dong Soo refusait alors, disant qu’il ne voulait pas donner son numéro à des inconnus, l’excuse bien connue. Même si au fond, il s’en fichait, d’habitude, il aurait accepté… Ce n’était juste… Pas le soir. Ou peut-être pas la bonne personne. Au fond, Dong Soo ne savait même pas pourquoi il avait refusé, c’était… Sorti tout seul. Un simple “Non désolé, je ne donne pas mon numéro à n’importe qui” était sortit de ses croissants de chairs tout seul. Alors qu’il regardait le client partir déçu, il soupirait grandement avant de partir au bar, c’était un bon moyen de ne pas se faire “voir”. A vrai, dire dont la façon qu’était vêtu Dong Soo, était plus que voyante.

Qu’elle idée de venir travailler quand tu as une bad mood pareille aussi… Dong Soo se demandait si au fur et mesure de la soirée, tout irait mieux. Après tout, une bad mood ne partait pas en un claquement de doigts. Une grimace, un petit verre de soda et le voilà debout pour se diriger en dehors du bâtiment. Il avait besoin de respirer de l’air frais, c’était indispensable. Il avait l’impression d’étouffer dans cet endroit et qu’un malaise était probable. L’air frais frappait finalement le visage de Ding Dong. Il soupirait une énième fois. L’air de dehors remplissait ses petits poumons, de l’air “pur”, ça c’était agréable… Beaucoup plus que l’air qui était bloquée dans le LoverHolic… Cet air, mélangé d’alcool et de parfum de bougies... ça donnait, une atmosphère bizarre, certainement.

Sortant son téléphone de sa poche, Dong Soo traînait sur les réseaux sociaux. Il s’était récemment inscrit sur Instagram, il ne savait pas ce qu’il allait en foutre, mais c’était un peut-être un moyen de connaître des personnes hors le LoverHolic, non ? Ou était-ce qu’une nouvelle mauvaise idée... ? Il ne savait pas, ne s’étant jamais réellement inscrit sur cette application. La tête baissée il ne faisait pas réellement attention au monde autour de lui, l’air de dehors l’avait calmé, c’était déjà un point fort de la situation.

- Ça mord ?

A l’entende de cette voix, l’host levait son regard. Il tournait son visage vers cet homme, qu’il n’avait… jamais vu ? Encore ? C’était la soirée spéciale des “jamais vus” ou quoi ? Dong Soo rangeait alors son portable, c’est qu’il avait une sacré belle gueule ce mec-là. C’aurait pu donner une forte crise cardiaque à un certain Min-Ho. Mais là, n’était pas le sujet, il parlait à Dong Soo.

- Ça avait mordu, cependant je suis sortis prendre l’air… C’est beaucoup trop lourd à l’intérieur. répondait-il, d’une voix digne d’un bad mood.

"Night Owls"

OH … MON … DIEU ! Moi qui pensais avoir tout vu … . Non mais regardez-moi ces deux là. Seigneur, par pitié pour ma rétine et pour l’amour de tout ce qui est hygiénique : trouvez-vous une chambre ! Je sais bien que s’envoyer en l’air devant témoin c’est existant, mais quand même, il y a des limites à tout. Qu’est-ce qu’il fait sa langue là ? D’accord, ils ont visiblement décidé de ne rien m’épargner. Donnez-moi deux minutes, histoire que je me retire cette image de la tête. Ah non, non, c’est foutu : je suis condamné à vivre avec. Yeurk, le sexe entre hétéros, c’est tellement … écœurant. Dommage que le délit d’hétérosie, ne soit pas reconnu et sévèrement puni par la loi. Ah, si seulement je pouvais être à la tête de ce pays … ! Croyez-moi, la première chose que je ferais, c’est de créer une loi qui interdirait ce genre de … roulage de patin et de palpation obscène. Non correction, ça serait la seconde. La première serait un décret qui rendrait prohibé le port de chaussures noires avec une ceinture marron, et inversement. Ca, cela mériterait la prison à vie ! Non, la peine de mort, carrément ! Ok, ok Ki O, cool. C’est bon, il n’y a pas mort d’homme. Pas la peine de faire monter le compteur comme ça là, on dirait tu vas exploser. Eh puis, en plus d’être mauvais pour le cœur, ça marque les rides. Tu n’as vraiment pas besoin de ça mon chéri.

Dois-je te rappeler que la cérémonie pour les Adonis de la beauté, a lieu dans moins de trois semaines ? C’est quoi ton plan au juste ? Que ce fieffé de Dae Ryuk t’éclipse et te vole la vedette ? Je ne sais pas si c’est ce que tu recherches, mais en tout cas c’est drôlement bien imité ! Oui, oui bon ça va, j’ai compris ! La jouer détaché et je-m’en-foutiste. Cela devrait pas être bien dur, étant donné qu’en temps normal, c’est ma spécialité. Pardon ? Mon emportement de tout à l’heure ? Un petit moment de faiblesse et d’égarement, tout simplement. La faim me fait perdre tout sang-froid et self contrôle. Ah oui, je ne vous ai pas dit, mais ça fait un mois que je ne mange plus que des cannettes de régime et m’astreins à deux heures d’exercice physique par jour, en vue de cette stupide cérémonie. Tout ça pourquoi ? Eh bien, tout ça pour perdre un kilo ! Alors oui, il se pourrait bien que je sois quelque peu, comment dire … irritable. Franchement, si je ne remporte pas ce satané award, je sens que je vais faire un scandale. Non, mieux encore, je vais laisser une fausse rumeur sur le compte du gagnant. Œil pou œil, dent pour dent. Tous les coups sont permis dans l’univers de la mode. Même les plus bas. Petites choses naïves, candides et autres adeptes du monde des Bisounours : passez votre chemin. Tiens justement, en parlant de petite chose … . On dirait bien que la succulente sucrerie juste à côté de moi est d’une humeur massacrante.

C’est du moins ce que me laisse à penser le ton sec, qu’il use pour me répondre. Hum … tu me plais, toi ! Je sens qu’on va bien s’amuser … hahaha ! Force est de constater qu’une fois encore, j’ai vu juste et ai eu le nez fin. Ce mec est effet des plus intéressants, et a le chic pour éveiller mon intérêt. Et peut-être même pas seulement cela … . Je le dévisage, le jauge, le toise. Puis, en expirant la fumée de ma cigarette par les narines, je lui réponds, non sans laisser s’échapper un petit ricanement grinçant. « Planter un client … . Voilà qui est courageux. Ou alors incroyablement stupide. A vrai dire, je m’interroge et ne sais pas trop quoi en penser. ». Ok, alors de deux choses l’une. Soit ce mec est une vierge effarouchée tout droit échappée d’un couvent de Carmélites, et qui a préféré prendre ses jambes à son cou lorsqu’il a découvert et s’est confrontté à la triste réalité de ce bas monde. Soit pour une raison X ou Y, quelque chose relevant de sa vie privée le tracasse et l’empêche de faire correctement son « travail ». Ce qui est sûr, c’est que l’un ou l’autre : c’est mauvais pour le business. J’ignore si c’est la façon dont il gagne sa vie, ou si comme moi, c’est un extra lui permettant de se faire de l’argent facile, mais ce qui est clair, c’est qu’il ne risque pas de faire recette ce soir. Pas tant qu’il continuera d’afficher son humeur de dog. Pire qu’un repoussoir, c’est un véritable tue-l’amour.

Personne ne se risquera à l’aborder, s’il s’obstine à être dans cet état d’esprit. On n’attire pas les mouches avec du vinaigre, c’est bien connu. C’est comme s’il avait planté un grand panneau « stop », ou un feu tricolore bloqué au rouge devant lui. Si son but est de dissuader les gens de venir se délester auprès de lui de quelques Wons, alors il ne peut pas mieux s’y prendre. Mais, peut-être que c’est justement ce qu’il veut ? En tout cas, s’il ne veut pas faire chou blanc ce soir, il a tout intérêt à très vite changer d’attitude. Dans un geste très théâtral, je donne une pichenette à mon mégot de cigarette, qui atterrit un peu plus loin dans le caniveau. Tout en recrachant une dernière nébuleuse de tabac, j’ajoute sur un ton trahissant mon insatisfaction, et en fixant le ballet des voitures remontant la rue : « Bien malgré moi, je me retrouve dans la même galère que toi. J’étais à deux doigts de mettre le grappin sur un porte-feuilles sur pattes, et de décrocher le gros-lot. A ceci près que c’t’imbécile ne tient pas l’alcool. Résultat, il est en train de cuver à l’intérieur. A moi la peur, s’il n’a pas déjà dégueulé tripes et boyaux depuis le temps ! ». Ouais … ça, c’est sans conteste la merde de la soirée ! Ah, ce que je rêverais qu’il existe un système qui éviterait ce genre de tuile. Genre une espèce de code-barre, dont on serait tous affublé. On le scannerait du regard et … hop, on aurait en un clin d’œil tout un tas d’informations fortes utiles au sujet d’un mec !

Comme par exemple, la taille de son affaire. Est-ce que c’est un super coup, ou non. Le nombre de langues qui sont passées dans cette bouche avant vous. Des avis de consommateurs. Ou encore, le nombre totale de MST contractées, ainsi que la date à laquelle remonte la dernière, s’il y a un passif de ce côté là. Avouez que cela serait quand même diablement pratique, et que ça éviterait pas mal de déconvenues ! Quoi ? Comment ça, c’est débile ? Et faire du feu avec un I-phone, ce n’est pas débile ça peut-être ?! On est au vingt et unième siècle. Si on arrive a envoyé des tocards dans l’espace, alors pourquoi ne pourrait-on pas greffer un malheureux code-barre sur les gens ? Enfin … n’y pensons plus. Je suis entrain de me faire du mal tout seul. Hum … je sais que Tsukiko a pour habitude de classer ses employés par « gamme ». Il y a ceux et celles que le quidam de base peut solliciter, mais il y a également les « stars », dont seuls les puissants et les nantis peuvent s’offrir les services. Il n’y a pas trente-six moyens pour un employé se trouvant au bas de la pyramide, d’avancer dans la hiérarchie. Seule l’expérience fait foi. Je me demande bien où se peut bien se situer cette petite merveille dans la chaîne alimentaire ? Je vais rapidement être fixé. Arborant une petite moue, je demande à « Monsieur Beau cul belle gueule », en adoptant un faux air de snobinard suffisant : « Au risque de paraître très direct et indiscret … combien tu te fais en moyenne, au cours d’une soirée comme celle-ci ? ». S’il fait partie des personnes les plus en vue et les plus prisées de cet établissement, alors il est légitime qu’il puisse jouer les minorés et choisir qui aura la chance de passer un moment avec lui. Dans le cas contraire … . Eh bien, il est entrain de se suicider professionnellement. Quand on est au plus bas, travailler à perte est la pire chose qui puisse être. Un seul mot d’ordre pour les petits nouveaux : toujours faire tourner le compteur. S’il ne veut pas être relégué au placard et s’il désire palper un max, il n’y a que comme cela qu’il y arrivera. Oui, ça peut ressembler à du travail à l’abattage ou à la chaîne. C’est un rite de passage quand on débute dans le petit monde de la galanterie. Nul ne peut s’y soustraire.                      

"Night Owls"

Aller Dong Soo, ça va passer… Comme toute les autres fois où il était en constante bad mood. Il n’y a pas de raisons particulière, ni de cure pour qu’il redevienne l’idiot qui ne cesse de sortir des blagues. Ses bad moods peuvent s’avérées insupportables, que ce soit pour l’host ou pour une autre personne. La sonnette n’était juste, pas dans la bonne période de sa vie… La redescente sur terre l’a frappé en plein visage, il ne pouvait pas rester le gamin qui rêvait des grandes choses alors qu’il se foutait tout seul dans le ravin. L’idiotie avait failli le tuer, et il s’est rendu compte qu’au final, ses parents avaient raisons. Il n’allait rien foutre de sa vie qu’à par se faire sauter par des inconnus. Et oui, c’était les paroles de ses chers parents. Son père n’avait jamais assumer le fait que son fils soit homosexuel et sa mère n’arrêtait pas de vouloir le marier obligatoirement à une femme. Chose qu’il refusait catégoriquement, de ce fait, il avait quitté le cocon familiale à l’âge de 20 ans. Il espérait qu’en partant, ses parents comprendraient le pourquoi du comment… Mais ça n’a fait qu’empirer les choses. En les croisant plusieurs fois dans les rues de Séoul, Ding Dong n’osait jamais lever son regard vers eux, et les seules fois où il avait tenté de faire le premier pas, ces derniers l’avaient regardé et lui avaient demandé qui il était. Renié à cause de son homosexualité, comment les gens peuvent-ils faire ça ? Dong Soo savait que l’homosexualité était mal vue en Corée, mais à ce point, il ne fallait pas pousser mémé dans les orties ! C’était pour cela qu’il prétendait être hétérosexuel… Mais en temps normal, il disait qu’il était gay et que ça ne lui posait aucuns problèmes… Ce sont des mensonges, fort évidemment. Comment s’assumer soit-même quand les personnes que tu aimais partent au fur et à mesure. Etait-ce Dong Soo le problème ? Si c’était le cas, les gens devraient lui dire au lieu de partir comme des voleurs… Il n’allait pas évoluer ainsi, ou peut-être que si… Cela devait être la meilleure solution, l’abandonner pour qu’il comprenne…? Mais quel était le problème, justement.. Etait-ce le fait qu’il soit un gamin ? Idiot ? Naïf ? Ou encore, le fait qu’il passe des nuits avec des inconnus à faire je ne sais quoi ? Tant de questions traversaient l’esprit de l’host. Woah, mais c’était les bad moods qui le faisait réfléchir ou c'était parce qu’il avait un minimum de maturité ? Va falloir en faire une dissertation.

Cependant, l’homme à la belle gueule l’avait accosté. Pourquoi ? Que voulait cet homme au juste ? Etait-il comme les autres ? Le payer une certaine somme pour qu’il atterrisse dans son lit ? Dong Soo se posait des questions à son sujet, pourquoi venait-il l’aborder… En temps normal, il aurait laisser couler, une discussion pas piquée des hannetons et des vannes salaces toute les trente-six secondes. Il avait subitement changé, ses collègues n’avaient pas remarqués, mais une personne qui le connaissait bien pouvait apercevoir qu’il était mal au point… Enfin, ce n’était pas difficile de déceler qu’il allait mal, rien qu’en voyant son visage qui en disait long. C’est juste que ses collègues eux, étaient plutôt préoccuper à satisfaire les clients qu’écouter les problèmes de Dong Soo. En regardant le bel homme qui se présentait à côté de lui, il le regarder fumer, expirant cette fumée sûrement toxique. L’host n’aimait pas les gens qui fumaient, il en avait rencontré des gens comme ça et, toutes étaient de mauvais souvenirs.” Planter un client … . Voilà qui est courageux. Ou alors incroyablement stupide. A vrai dire, je m’interroge et ne sais pas trop quoi en penser. “ Dong Soo soupirait, bien évidemment que c’était une mauvaise idée. Mais, c’en était pour la bonne cause… Un numéro de téléphone à la place d’une proposition d’un petit moment intime était tout sauf une agréable surprise. Au fond, l’host s’en foutait des personnes avec qui il passait ses nuits. Tout ce qu’il voulait, c’était d’oublier cette douleur qu’il avait dans son pauvre petit coeur et oublier ses parents. Tout oublier en réalité. “ J’ai préféré le planter, une longue et chiante phrase de drague pour enfin me proposer d’échanger nos numéro… C’est pas pour moi. “

Peut-être que Dong Soo se trompait de route. Vouloir s’envoyer en l’air, n’était vraiment la solution adaptée pour vaincre sa peine. Mais il n’assumait pas sa sexualité, alors peut-être que ça pouvait l’aider à oublier le fait qu’il devait assumer. Il se l’était promis, il allait pouvoir s’assumer un jour et personne pourrait le rabaisser. Pour l’instant, il était beaucoup trop faible moralement pour réussir à surmonter les rabaissements des autres et surtout de ses parents. “ Bien malgré moi, je me retrouve dans la même galère que toi. J’étais à deux doigts de mettre le grappin sur un porte-feuilles sur pattes, et de décrocher le gros-lot. A ceci près que c’t’imbécile ne tient pas l’alcool. Résultat, il est en train de cuver à l’intérieur. A moi la peur, s’il n’a pas déjà dégueulé tripes et boyaux depuis le temps ! “ L’host laissait échapper un petit rire de ses croissants de chairs. Ah, c’était agréable de rire, enfin. Il n’avait pas voulu vexé l’homme à ses côtés, ce n’était pas lui qui était ridicule mais plutôt l’autre dont il parlait. Ce genre de situation, lorsqu’un host en parlait à Dong Soo, ça avait pour don de le faire rire. Il mentirait s’il disait que ça ne lui était jamais arrivé, quelque fois, mais Dong Soo en rigole, c’est plutôt hilarant pour lui. “ C’est pathétique, ah la la la… Il est entrain de dormir par terre, tu vas me dire ? “

Même si ce n’était qu’un détail, quelqu’un qui dormait par terre dans le LoverHolic pouvait donner une mauvaise image. M’enfin, ce n’était pas ce qui préoccupait d’abord le jeune host. Ces abrutis qui ne tiennent pas l’alcool devrait être interdit d’entrer dans ce genre d’endroit. Et puis, pourquoi ils boivent s’ils ne tiennent pas l’alcool déjà ? Vraiment des abrutis écervelés ! Dong Soo, s’appuyait alors contre le mur derrière lui, croisant ses bras, sa chemise rouge velour était parfaite pour sa carrure et il en était content, c’était déjà ça. “ Au risque de paraître très direct et indiscret … combien tu te fais en moyenne, au cours d’une soirée comme celle-ci ? “ Le brun haussait les sourcils, c’était une question dont il avait compris le sens ? Combien il se faisait lors d’une soirée comme celle-ci, mais en temps normal ? Dong Soo détournait son regard pour réfléchir… Ce n’était pas évident de se rappeler exactement combien il réussissait à se faire durant une soirée. Pour la simple raison, qu’il n’était pas autant attirant que les autres host, ici. Parfois même, il se demandait ce qu’il faisait ici. “ Si j’ai bien compté… Je dois me faire au moins… 300 000  wons. “ Disait-il essayant de bien calculer dans son esprit. En réalité, ce n’était pas grand chose… Mais c’était assez pour lui, puisqu’il économisait. Et puis, c’était ses affaires… C’est ce qui le dérangeait un peu dans cette situation… Cet homme était arrivé de nulle part et il posait déjà des questions indiscrètes. Un peu trop posé, pensait Dong Soo.

"Night Owls"

Tiens, on dirait que le couple chaud du rez-de-chaussé s’est fait la malle. Ils ont probablement réalisé, que la rue n’était pas l’endroit le plus propice, pour s’offrir un coït stricto sensu. Ou alors, quelqu’un leur a balancé un seau d’eau froide pour les décoller ? Si tel est le cas, rappelez-moi de chaudement remercier ce dit « quelqu’un ». Copuler au grand air … ces jeunes ne se refusent vraiment rien ! D’autant plus qu’on est qu’au mois de Mars et qu’on se les gèle. Lors des fortes chaleurs de Juillet ou Août, à la rigueur je veux bien, et encore. Sans compter qu’avec le choc thermique, l’affaire de ce monsieur devait être … au plus bas, si vous voyez ce que je veux dire. Franchement, je suis scié. Je n’arrive pas à croire que malgré leur état d’excitation évident, ils fassent preuve d’autant de mièvrerie. Ah bah si, excusez-moi ! On voit bien que vous n’avez pas entendu les petits mots doux, sirupeux et gnian-gnian à mort, qu’ils se sont échangés. Quand diable la jeunesse coréenne est-elle devenue à ce point cucul la praline ? Visiblement, j’ai dû rater plus d’un épisode, lors de mon « exil » en Europe et en Amérique. Entre nous, ça a changé. Et malheureusement, pas en bien. Ce n’est plus comme avant. Ce n’est VRAIMENT plus comme avant ! De mon temps, on savait s’amuser … ! Oïtch, voilà que je parle comme les vieux débris que j’ai tant décrié par le passé … .

Ca y est, l’heure est venue : achevez-moi. Je me suis toujours juré que je préférais mourir, plutôt que de devenir réactionnaire, aigri, acariâtre et sinistre. Bref, tout ça pour dire que cette putain de jeunesse file un mauvais coton. En plus, je ne sais vraiment pas où ils ont appris à rouler des pelles, mais c’est effarent. On dirait des Bergers Allemands ! Le truc anti sexe au summum, et vraiment pas excitant pour un sou. Vous savez ce qui serait excitant en revanche ? Moi et la petite chose dans un lit … hahaha ! Mais je m’égare. Apparemment, j’étais dans l’erreur. Planter un client sous prétexte qu’il vous fait du plat, pour au final seulement vous demander votre numéro : c’est une raison suffisante. Le temps, c’est de l’argent. Inutile donc de le perdre avec un type, qui en attend plus de vous, que vous n’êtes en mesure de lui donner. Nous autres hosts et escorts de luxe sommes des objets de désir éphémères, que l’on peut consommer durant un laps de temps bien spécifique. Nous ne sommes en rien des petits amis ou des compagnons attitrés. Si c’est ça que ce type recherchait, alors c’est une agence matrimoniale ou un site de rencontres qu’il lui faut. Partageant l’avis de la piquante sucrerie, je me contente pour toute réponse d’incliner la tête sur le côté, et de lâcher un « hum » qui vient se heurter contre mes lèvres celées. Du genre : « Ouais, pas faux. ». Une chose est sûre, il raisonne déjà comme un vrai « professionnel ».

Ce qui est plutôt de bonne augure pour la suite de sa carrière. Intéressant. TRES intéressant, même … ! On dirait bien que cette soirée n’est peut-être pas complètement fichue. Contre toute attente, il se pourrait même qu’il reste un soupçon d’espoir. Oui, plus le temps passe, et plus j’ai le pressentiment d’avoir misé sur le bon cheval. Attention, j’ai bien dit pressentiment. Il est encore trop tôt pour poser des certitudes. Brisant le silence qui commence à s’enraciner, je lui fait alors part alors de ma mésaventure avec « Monsieur que de la gueule, et rien dans le pantalon ». Ah ? Au moins ça a le mérite de le faire rire. Toi, tu as de la chance d’être mignon, sinon il y a déjà bien longtemps que je t’aurais renvoyé dans tes vingt-deux, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. C’est quoi déjà le proverbe ? « Homme qui rit … . ». Hahaha … ! Encore animé par les feux de la colère et de la frustration, je me contente d’opiner du chef en plissant les lèvres, lorsqu’il me demande s’il est étendu par terre. Bon ! Ce n’est pas tout cela, mais il est temps d’attaquer les choses sérieuses. Combien ça palpe un joli minois comme celui-ci ? 300 000 ? Par heure ? Hein, par soir !? Doux Jésus, mais comment fais-tu pour vivre ? Ce n’est même pas le prix d’une paire de mocassins en daim griffée Jimmy Choow. A ce tarif là, tu as tout aussi bien fait d’aller tapiner au coin de la rue.

En même temps … pourquoi est-ce que cela ne m’étonne-t-il qu’à moité ? Tsukiko est certes une femme de cœur haute en couleur, mais c’est surtout et avant tout une femme d’argent doublée d’une redoutable businesswoman. Le pourcentage qu’elle doit ponctionner sur les gains de ses employés, est sûrement faramineux. Ceci explique donc cela. Quel gâchis, vraiment ! Rassure-moi, tu as bien conscience qu’au vu de la marchandise que tu as à proposer, tu es entrain de te faire entuber sévère. C’est comme si un footballeur sélectionné en équipe nationale, jouait en seconde division. Tu es au courant qu’on a aboli l’esclavagisme, mon mignon ? Même si, je te le concède, il subsiste aujourd’hui sous des formes modernes. Hum … y aurait-il un défaut de fabrication ? Afin de m’en assurer, je me mets à tourner lentement autour de cette petite merveille, tel un lion qui s’apprêterait à bondir sur sa proie. Mes yeux le passent aux cribles des pieds à la tête, et sous tous les angles. Examen sous toutes les coutures. Détail minutieux de l’article. Autopsie exhaustive. Hummmm … aussi alléchant du côté pile que du côté face ! Ca se confirme, tu mérites sans conteste le titre de « Monsieur Beau Cul Belle Gueule ». Devant un aussi agréable spectacle, je ne peux m’empêcher de passer avec concupiscence ma langue sur ma rangée supérieure de dents. Lorsque je finis par m’immobiliser de nouveau devant ce bijou, je lui agrippe la mâchoire et lui fait incliner la tête sur la droite et sur la gauche, toujours à la recherche d’une éventuelle difformité.

Tiens-toi tranquille, petite chose ! Oh, mais c’est qu’on a du caractère, et qu’on mordrait … . J’aime ça ! En lui rendant sa liberté, j’étouffe un ricanement cynique et limite malsain. Sortant la pochette de la poche pectorale de mon blazer, je m’essuie les mains tout en le regardant avec une lueur à mi-chemin entre la sournoiserie et la lubricité dans le regard. Oui, c’est plus fort que moi : je ne peux pas m’empêcher d’agir comme le dernier des salauds. En remettant le morceau d’étoffe à sa place, je lui demande sur un ton à la fois taquin et aguicheur : « Et … tu n’as jamais songé à « te mettre à ton compte » ? ». Loin de moi l’idée de déposséder Tsukiko de ses employés et de lui faire fermer boutique. Seulement, faire son beurre sur le dos d’un joyau pareil : c’est presque criminel. Selon moi, il est fait pour scintiller de mille feux, et être le seul bénéficiaire du fruit de son travail. Alors oui certes, je ne vous cache pas que voler de ses propres ailes dans ce milieu est extrêmement difficile et dangereux. Surtout au début. Cela-dit, entre une vulgaire gagneuse et une courtisane : il n’y a clairement pas photo. Déjà pour commencer, il gagnerait excessivement plus. Ce qui est logique après tout, vu qu’il serait son propre patron. Pas de maquerelle, pas de souteneur ni de tierce personne, qui sucrerait une partie de l’argent que vous avez dûment gagné à la sueur de vos reins.

Le seul petit bémol, c’est que sans réseau ni carnet d’adresses, il ne risque pas d’aller bien loin. Toutefois, ça peut s’arranger. Suffit juste qu’une âme charitable, lui mette le pied à l’étrier. J’ai un bon nombre de clients riches à million, accros aux jeunes lionceaux et qui ne font plus appel à moi. Ces enculés estiment que j’ai, je cite : « Dépassé la limite d’âge ». En revanche lui, je suis prêt à parier qu’il serait pile leur style. Eh puis, je ne me fais pas trop de souci pour lui. Craquant comme il est, le bouche à oreille devrait très vite faire son effet dans les hautes sphères. En deux temps trois mouvements, il sera sollicité plus que de raison. Autre petite ombre au tableaux, s’il veut survivre, il va falloir qu’il se constitue une garde robe digne de ce nom, signée Gauthier, Dior, Saint Laurent et j’en passe. Pourquoi ? Eh bien, si l’on souhaite attirer le riche, il faut avoir l’air riche. Qu’on ne le soit pas n’est pas un problème, mais il faut à tout prix laisser paraître qu’on l’est. Hum, je doute qu’avec ce qu’il touche ici, il puisse se payer un costume trois pièces estampillé Armani. Mais peut-être que je me trompe … une fois encore. Je hausse les sourcils et demande sur un ton empli de sarcasme et de cynisme : « Quoi ? Il y a une clause de non concurrence et d’exclusivité dans le contrat que tu as signé ici, qui t’en empêche peut-être … ? ». Remarque, connaissant Tsukiko, cela ne serait pas impossible. Elle serait bien du genre à ramasser dans la rue, de jeunes êtres naïfs et un peu paumés. Elle leur fait miroiter monts et merveilles, les bichonne, les relooke et … hop, il sont à sa botte et pris au piège ! Très malin, vu qu’elle a investi de l’argent sur eux. La plupart devant être sans le sou, ils ont donc une dette envers elle à rembourser, et lui sont redevables. Tant qu’ils ne s’en sont pas acquittés, ils sont donc coincés ici et « condamnés » à bosser pour elle. Quand bien même ils ne lui doivent plus rien et veulent tout de même s’en aller, elle doit probablement exiger une forte somme d’argent en échange de leur départ, pour compenser le manque à gagner. Si tel est le cas, alors chapeau bas ! C’est un concept niquel. Une mécanique bien huilée. Perfide, ignoble et abjecte … je suis fan ! Hum … si ce que je dépeins là est la triste réalité, qui régit l’arrière-boutique du LoverHolic … alors, tu n’est pas sorti de l’auberge gueule d’ange !

"Night Owls"

Ahh… Douce bad mood… Pourquoi fallait-il qu’elle apparaisse un jour pareil ? Dong Soo aurait préféré avoir une bad mood lorsqu’il est en repos, mais pas quand il est au travail… Ca le rendait, désagréable. Bien même que le seul qui l’avait approché avant que ce ne soit monsieur belle gueule, était un gars qui avait cru que c’était un établissement de rencontres pour relations sérieuses. Il espérait d’ailleurs que ce jeune homme était parti après le remballage de Ding Dong, parce que demander aux autres host s’ils voulaient échangés leurs numéros, revenait à plusieurs remballage dans la soirée. Le brun aurait dû lui dire plus tôt, quel idiot. Dong Soo, ne savait pas comment réagir, la soirée avait l’air calme, et remplie de surprise… Mais ce gars qui l’avait approché… L’intriguait. Il n’aurait jamais espéré trouver un gars pareil dans un endroit pareil. Peut-être que l’host avait sous-estimé les chances de trouver quelqu’un d’intéressant. Ou alors, il faisait une très grande fausse route et se faisait déjà des idées qui ne tournait que dans sa tête. Comment l’host pouvait penser à de telles choses alors qu’il ne savait rien de cet homme ? Il avait l’air d’être venu juste pour le mater de plus près et de lui poser des questions sans discrétions. Mais ça n’avait pas l’air de percuter l’esprit du jeune homme, sa naïveté le rendait énormément vulnérable et pouvait le mettre dans de sales draps. Peut-être que le gars était un membre de la Mafia ? Un pervers ? Qui sait ? Personne. Dong Soo pouvait souvent tomber sur des personnes malsaines et au fond de lui, il espérait que cet homme n’en était pas un. Encore, les hosts avaient de la chance, les gens étaient “contrôlés” avant de rentrer dans le LoverHolic. Alors un potentiel pervers, pouvait être viré comme si de rien n’était. M’enfin, c’était comme ça que ça se passait dans l’imagination de Ding Dong, peut-être beaucoup trop naïf, finalement. Il était sûr qu’un jour, sa naïveté le tuerait.

Après avoir vu le visage de l’homme à ses côtés, Dong Soo ne savait pas vraiment comment le prendre, était-ce finalement la réponse positive à sa question ? Le gars dont il parlait, était réellement en train de dormir par terre, dans le LoverHolic ?! Nom d’un lampadaire qui ne marche pas. C’était vraiment pathétique aux yeux de Dong Soo, les gens qui ne tenaient pas l’alcool devrait tout simplement ne pas toucher à l’alcool, c’est insupportable ! Et puis, l’alcool… Dong Soo ne supportait pas cela; le goût, l’odeur… Ça… Le dégoûtait. Et puis, se bourrer la gueule comme la dernière soirée spéciale, l’avait beaucoup plus dégoûté de l’alcool. Bah oui, il s’était retrouvé dans une robe trop petit pour lui d’Alice au Pays des Merveilles et puis, il avait eu l’impression d’avoir mangé des champignon hallucinogènes en voyant la mamie qui faisait du karaoké en pleine rue. Oui, cette soirée avait été spéciale et, en rentrant chez lui.. Il s’est immédiatement dit d'arrêter l’alcool… Ne pas tenir l’alcool, c’était une chose assez commune chez les gens et parfois, ça pouvait être hilarant. Sauf que quand ça tombe sur une personne qui était “ton” client… Ce n’était pas hilarant, non. C’était pathétique et assez décevant.

En répondant à sa question, Dong Soo savait très bien que ce n’était pas “assez”. Mais, il arrivait à vivre avec, après tout, il savait très bien comment se faire passer pour un “riche” en achetant des vêtements “bas de gamme”. Rien que sa chemise rouge satin, faisait cet air de riche… Mais pas trop. Puis, Dong Soo aimait un peu la mode, mais ne pouvait pas s’offrir de ces marques que les idoles et riches portaient tous le temps.... Gucci, Hermès, Louis Vuitton et pleins d’autres encore. Enfin, c’était les aléas de la vie, pas tous le monde pouvait s’offrir des vêtements de luxes, alors ils font comme ils peuvent pour suivre la mode… Comme fait Ding Dong. Même parfois ça ne marchait pas, il savait comment s’habiller avec sa carrure “musclée” si l'on peut appeler sa carrure comme ça. D’ailleurs il s’était soudainement rappelé qu’il devait retourner à la salle de musculation, de quoi garder en forme ses petits muscles. Enfin, ce n’était pas le sujet ! Plus les secondes passaient, plus le silence s’installait. Mais quelque chose prenait en compte l’attention de l’host, cet homme… Il s’était mis à tourner autour de la sonnette, quoi ? Il voulait une meilleure vue de son fessier ? Faut pas avoir honte de le demander, il lui en donnerait une meilleure avec plaisir… Hum. Après cela, il s’arrêtait finalement devant lui, quoi encore ? Oh, Dong Soo ne s’était pas attendu à ça… L’homme lui avait agrippé la mâchoire et inclinait le visage de l’host de droit à gauche… Comment Dong Soo devait réagir à ça ?  Mis à part, qu’il “luttait” un peu pour éviter de trop tourner sa tête… Pourquoi ce gars faisait-il ça ? Il avait besoin de savoir si l’host laissait pousser sa barbe ? En réponse, ce n’était pas le cas. Dong Soo trouvait que la barbe ne lui allait pas… Alors il la rasait tranquillement, souvent… trop souvent. Après tout, il n’aimait pas voir un seul poil de barbe sur son visage, qu’il considérait de “magnifique”. Narcissique ? Non pas du tout.


“ Et … tu n’as jamais songé à « te mettre à ton compte » ? “ à son compte ? Mais il prenait Dong Soo pour un gars intelligent ? Quoique, il ne le connaissait pas alors, il ne pouvait pas savoir quelle était la personnalité de la sonnette. L’host était celui qui suivait et non celui qui menait la danse. Peut-être qu’à l’extérieur, il donnait l’air de la mener cette danse… Mais l’intérieur de lui, c’était le contraire complet. Il ne savait pas sur quel pied danser, il avait un peu peur de l’inconnu, mais se lançait tous les jours quand il rencontrait un nouveau client. Alors se mettre à son compte, était… Une mauvaise idée, il allait finir par perdre tout ses moyens et faire n’importe quoi. Peut-être qu’aujourd’hui il était redescendu sur terre… Mais ce n’était qu’une bad mood… Alors demain, personne ne savait s’il serait dans la même humeur ou pas. “ Me mettre à mon compte ? Je pense que je ne suis pas assez comment dire “mâture” et “responsable” pour “me mettre à mon compte”... “ répondait-il. Après tout, il se rendait lui-même compte qu’il n’était pas mâture, ni responsable. Était-ce un autre Dong Soo qui parlait à la place de l’original ? Où était donc passé l’immaturité de la sonnette que nous connaissons tous ? Partie en vacance, apparemment.

“  Quoi ? Il y a une clause de non concurrence et d’exclusivité dans le contrat que tu as signé ici, qui t’en empêche peut-être … ? “  Euh… Bah… Dong Soo en savait rien… Il avait signé à l’aveuglette. Il avait seulement lu les premières lignes du contrat. Oui, il était idiot. Après tout, Tsukiko l’avait trouvé dans la rue et lui avait immédiatement demandé -grâce à sa beauté- s’il voulait intégrer son LoverHolic. Et le voilà, désormais… Soo, son surnom d’host est connu… Mais ce dernier est payé d’une maudite somme de 300 000 wons… Il se demande souvent s’il ne devrait pas demander une petite augmentation pour ses heures de travailles. Mais bon, il ne l’a jamais fait et ce n’était pas maintenant qu’il allait le faire… Fort évidemment. “ Je n’ai pas regardé dans le contrat… Je l’ai pas lu, tout simplement, je pense que j’étais un peu trop “désespéré” pour avoir lu. “ Et c’était le cas, il avait quitté ses études de théâtre car il ne pouvait plus les payer ! Comme il avait quitté le cocon familial, le seul moyen pour Dong Soo, était de signer ce contrat ou il était fichu. Il n’allait pas gagner de l’argent en ne bougeant pas le petit doigt, après tout. Puis, une question lui passait par la tête et bien évidemment qu’il allait la poser, il n’allait pas se gêner ! “ Au fait, pourquoi tu m’as “examiner le visage” ? Si je peux dire ça, comme ça. “

Non mais sérieux ! Il avait mal rasé sa barbe ou quoi ? Il avait oublié de mettre une crème hydratante ? Sa peau était trop sèche ? C’était quoi le problème à la fin ?!